Yves Fayolle, entrepreneur / slasheur et créateur d’emploi
C’est en 1998, après une formation d’ingénieur (complétée par un cursus en gestion/management) et une carrière dans le secteur industriel, qu’Yves Fayolle rencontre le monde du handicap et du travail protégé. Tout d’abord à l’ADTP de Cran-Gevrier, puis l’ADAPEI à Valence, et aujourd’hui au sein d’Aller Plus Haut, avec l’ESAT du Faucigny à Bonneville, à Sallanches et à Cluses. Après avoir mis en place de nouvelles stratégies commerciales et industrielles, il est parvenu à redresser ces entreprises adaptées, pour les préparer à mieux affronter les enjeux de demain.
« Mon objectif principal est de créer de l’emploi pour tous les “cabossés de la vie“, avec un salaire universel et un travail à la carte. En m’appuyant sur la technologie, pour compenser les situations de handicap, je mets de l’humain au cœur de l’entreprise. Passer d’une logique de coût à une logique de valeur ajoutée, voilà ma stratégie de développement. »
Un cercle multi-métiers vertueux
Dépasser le cadre d’une approche mono-métier, en créant des activités pluridisciplinaires, où chacun serait tour à tour client et fournisseur de l’autre, voilà le cercle vertueux qu’Yves Fayolle a mis en place à l’ESAT du Faucigny. A l’instar de La Cafétéria des Lacs. Celle-ci nourrit ses propres ouvriers, en plus des clients des entreprises voisines, et cultive même son propre jardin potager bio. Elle a également besoin de blanchisserie, d’hygiène, d’entretien et de rénovation de ses locaux. Autant de métiers intégrés au sein de l’ESAT : « cela permet en plus de nous assurer que nous sommes toujours efficaces et compétitifs, car nous sommes consommateurs de nos propres services »
Quel que soit le secteur d’activité : restauration collective, blanchisserie, emballage, brosserie, agro-alimentaire, espaces verts, c’est en structurant l’organisation et en la rendant autonome et créative qu’Yves Fayolle est parvenu à retrouver la rentabilité, tout en consolidant les valeurs et l’équilibre social.
La technologie et la gestion au service de l’humain
« J’utilise la culture de la GPEC pour anticiper les besoins de l’entreprise et mettre en place les formations qui répondent à ces besoins. Selon moi, si un employé n’est pas efficace, c’est qu’il n’est pas au bon endroit. Je pars du projet de la personne, je lui fais tester différents métiers et, par la formation, je la fais évoluer vers le métier dans lequel elle va s’épanouir. Ainsi, mon adage est : diviser pour mieux régner ; mais moi je divise l’organisation pas les hommes ! »
Après un tour d’Europe, qui lui a permis d’analyser le fonctionnement des structures protégées au-delà de nos frontières, Yves Fayolle constate – suites aux directives européennes – que l’Allemagne et la Grande-Bretagne mettent tout en œuvre pour devenir autonomes, contrairement à la France.
C’est sur cette dynamique d’autonomie qu’il s’est appuyé pour faire de l’entreprise adaptée un levier exceptionnel qui s’est révélé très efficace notamment lors de la pandémie de COVID-19.
« Si cette période de crise a été encore plus complexe pour des établissements comme les ESAT, elle nous aura aussi permis d’inventer une autre étape. En bousculant nos valeurs, la pandémie a aussi conforté ma vision de l’économie sociale et solidaire », précise Yves Fayolle.
En investissant dans la structure DIL, Yves Fayolle a pour objectif d’apporter du travail aux ouvriers de l’ESAT ainsi qu’à d’autres établissements. Les process et la technologie de DIL, via l’automatisation de l’outil industriel (pour les activités d’emballage et de brosserie) a permis, pendant les confinements, de se substituer aux personnes en situation de handicap. DIL a ainsi pu payer les prestations et financer les salaires, comme si les personnes avaient travaillé, alors que tous les ouvriers étaient contraints de rester chez eux.
De dirigeant à « serial entrepreneur »
Dès 2009, Yves Fayolle se lance dans la création et la reprise d’entreprises technologiques qui ont la capacité de se développer au-delà de leur territoire. Suivant son instinct et convaincu de ce « joli mariage », Yves Fayolle a ainsi donné une nouvelle dimension à DIL, la maison mère. Restant propriétaire des savoir-faire et des machines, ces dernières sont intégrées chez ses sous-traitants, dont l’ESAT du Faucigny. En déléguant une grande partie de la production au secteur de l’économie sociale et solidaire, DIL peut ainsi compter sur des ouvriers handicapés stables et efficaces.
« Tout le monde trouvait que c’était une bonne idée, mais personne n’osait se lancer. Alors le meilleur moyen était encore de le faire moi-même » ajoute-t-il.
Ainsi, en intervenant en tant que directeur, administrateur ou consultant, en fonction de l’entité qu’il représente, Yves Fayolle a réussi un pari osé : rapprocher deux univers qu’a priori tout sépare : l’entreprise privée et le secteur médico-social.
En 5 ans, il a ainsi investi dans plusieurs activités industrielles et agro-alimentaires, notamment l’emballage et la brosserie. Des activités qui à l’avenir se situeront « hors les murs » de ses sous-traitants. En ouvrant ses propres sites de production au secteur protégé, avec des outils adaptés, il a ainsi développé une coopération harmonieuse et rentable.
Entre disrupture et innovation, Yves Fayolle apporte aujourd’hui un nouveau regard sur l’entreprise et le secteur médico-social, avec une vision durable, respectueuse de l’homme et de l’environnement.